Qu'est-ce que la géographie ? La géographie, étymologiquement décrire le monde, implique en premier lieu le regard. Avant de décrire, il faut avoir regardé, il faut avoir vu. Cela mobilise aussi les quatre autres sens. On décrira mieux le monde si on a senti, touché, entendu et goûté. Inévitablement cela amène au sentiment. Qui est-il celui qui a décrit un lieu (c'est-à-dire vu, senti, touché, entendu et goûté) sans éprouver aucun sentiment, aucune émotion ? Celui-là, n'est certainement pas un homme.
Décrire, c'est ensuite partager. On décrit toujours à l'intention de quelqu'un, que ce soit pour soi ou pour d'autres (cette dernière proposition étant plus courante). Le partage implique l'autre (l'autre “Je” ou l'autre alter) et l'action (le “faire” de faire part de quelque chose à quelqu'un) qui est en fait une relation. Décrire est enfin le point de départ d'un cheminement qui mène à la connaissance, à la compréhension et enfin à l'appréciation. On apprécie souvent mieux les choses que l'on connaît et comprend.
Il est une question qui revient régulièrement ces temps-ci : le fait de connaître participe-t-il à atténuer la violence ? Connaître l'autre dans un monde où les contacts et la mixité entre cultures différentes vont croissants contribue-t-il à éviter des conflits ? Si la connaissance augmente la raison et la liberté, si ce qui est dit précédemment s'avérait au moins partiellement exact, alors, la géographie serait en première ligne, serait un instrument de paix et de citoyenneté. Plus que de penser l'autre, la géographie peut contribuer à penser à l'autre et par là être un altruisme de premier plan.